Mieux comprendre
Le contexte de l’intervention
Le littoral sud des Calanques entre Mont Rose et Callelongue a été le siège d’une importante activité industrielle aux 19ᵉ et 20ᵉ siècles (traitement de minerais de plomb, production de soude et d’acide tartrique notamment). De nombreuses traces de cette activité sont encore visibles aujourd’hui, sous forme de dépôts massifs de scories, résidus de traitement de ces usines, qui ont été utilisés notamment comme matériaux de remblais pour la construction des routes et parkings du littoral.


Les concentrations en métaux et métalloïdes parfois très importantes qui ont été mesurées au sein de ces dépôts (notamment en plomb et en arsenic) montrent que ces matériaux constituent encore aujourd’hui une menace pour l’environnement, via leur dispersion (envols de poussières, ruissellement et transfert à la mer par érosion…), et pour la santé des personnes qui résident ou fréquentent ce secteur habité et très touristique. Ces risques, pour les enfants et les adultes, ont notamment été établis par l’Institut National de Veille Sanitaire (INVS) en 2005 lors de la réalisation d’une étude de santé publique.
Un enjeu de santé publique..
Panneau mis en place au niveau de la plage de Saména (2006, ©ADEME)
Les résultats de cette étude ont amené l’INVS à proposer des actions de santé publique destinées à une prise en charge médicale des populations et une réduction de leurs expositions. La réhabilitation des sites pollués (y compris ceux qui n’ont pas été inclus dans l’évaluation des risques sanitaires, mais qui peuvent toutefois constituer une source de contamination), avec une priorité par rapport aux sites qui sont habités et fréquentés par des usagers, faisait notamment partie des recommandations.
Dans ce contexte, quelques opérations ponctuelles (confinement par confortement mécanique de talus) et parfois provisoires (délimitation d’espaces interdits de passage comme pour la plage de Saména) ont été mises en œuvre au début des années 2000. Toutefois, ces aménagements sont insuffisants et nécessitent d’être complétés ou remplacés, de manière à apporter une solution pérenne à cette situation environnementale et sanitaire dégradée.
…Et de préservation de l’environnement
Le contexte environnemental dans lequel se trouvent ces dépôts massifs de scories est également sensible. Le site des Calanques a été classé par l’État en 1975, c’est un site Natura 2000 depuis 1996 et les terrains concernés par les scories se trouvent au cœur du Parc National des Calanques créé en 2012. Lors de la création de ce dernier, le Conseil National de la Protection de la Nature (CNPN) s’est prononcé favorable au classement à condition que les pollutions du littoral sud soient traitées (cf. avis du CNPN du 11/12/2008).
L’intervention de l’ADEME dans ce contexte
L’ADEME a été chargée de la maîtrise d’ouvrage des travaux de mise en sécurité permettant de couper les voies de transferts et de supprimer le risque d’exposition des personnes aux polluants contenus dans les dépôts de scories (plomb et arsenic notamment) présents sur le littoral sud des Calanques de Marseille. Cela fait suite à la circulaire du 26 mai 2011 relative à la prise en charge de sites pollués dont le responsable est défaillant (remplacée par l’Avis ministériel en date du 29 mars 2023) et à l’arrêté préfectoral du 15 mars 2012.
La mise en place du chantier
Cette mission a débuté en 2013 par une hiérarchisation des dépôts massifs de scories présents au sein du Parc National des Calanques, en fonction de leur potentiel de contamination du milieu et des personnes, conduisant à retenir 20 dépôts de scories. De manière générale, ces dépôts correspondent aux dépôts les plus accessibles avec des concentrations en métaux élevées, présentant un risque élevé d’exposition et de transfert de pollution.
Dans le cadre des études d’avant-projet, plusieurs solutions de réaménagement ont été étudiées pour chaque dépôt, en identifiant pour chaque scénario les avantages et inconvénients, et en prenant notamment en compte les contraintes environnementales, d’insertion paysagère et techniques.
Quelques exemples des avantages et inconvénients étudiés pour comparer les différents scénarios de gestion des dépôts :
Avantages
Les objectifs de l’arrêté préfectoral sont entièrement remplis (suppression des transferts et pas de problème de stabilité).
Supprime les chemins tracés par les visiteurs au droit d’un espace naturel sensible.
Permet de gérer les eaux de ruissellement.
Renforce le soutènement de la voirie actuellement endommagé.
Inconvénients
Intégration paysagère modérée : la topographie initiale du dépôt est modifiée.
Reprofilage des dépôts nécessaire (risque d’envols de poussières, de déversements de scories en mer…).
Destruction d’une partie de la végétation avec impact d’espèces végétales protégées.
Dans le contexte environnemental particulièrement sensible du site où se trouvent ces dépôts (cœur de Parc National, site classé, site Natura 2000), la conception des opérations de mise en sécurité a été menée en tenant compte d’un très haut niveau d’exigence environnementale, en étroite collaboration avec les services de l’État (DREAL PACA, DDTM, ARS et Parc National des Calanques notamment).
Ces échanges ont conduit à réviser les ambitions du projet afin que celui-ci concilie les intérêts sanitaires, environnementaux et d’insertion paysagère incontournables au regard de la situation géographique des dépôts.
Les études de projet ont ensuite été réalisées de 2020 à 2022 sur la base des études précédentes pour préciser les choix techniques et les modalités pratiques d’intervention.
Chacun des 20 dépôts fera l’objet d’un traitement au cas par cas qui résulte du consensus obtenu après prise en compte des différents enjeux du projet. Toutes les alternatives techniques financièrement soutenables ont été envisagées pour la mise en sécurité de ces dépôts de scories. Seules les solutions arrêtées à l’issue de la phase projet permettent aujourd’hui de concilier de manière réaliste les enjeux sanitaires, d’insertion paysagère et de préservation de la biodiversité.
Phase de conception des travaux
Arrêté préfectoral de travaux d’office du 15/03/2012
- 2013 : diagnostic
- 2014 : présentation de l’avant-projet aux services de l’État
- 2018 : validation de principe des solutions d’aménagement pour la gestion des dépôts
- 2022 : finalisation du détail technique du projet
- 2023 : autorisation réglementaires
Phase de réalisation des travaux
Arrêté préfectoral de travaux d’office du 11/03/2024
- Septembre 2025 : début de la première phase de travaux
- Mars 2026 : fin de la première phase de travaux
- Septembre 2026 : début de la seconde phase de travaux
- Mars 2027 : fin de la seconde phase de travaux
Les solutions déployées
Les 2 principes de mise en sécurité des dépôts de scories qui ont été retenus sont les suivants :
- Évacuation totale ou partielle des dépôts (solution privilégiée autant que possible)
- Et / ou confinement au moyen d’ouvrages pérennes
Lorsque le retrait des dépôts n’est pas techniquement possible (extension sous des infrastructures existantes, impact trop important pour les espèces protégées…) ou financièrement soutenable, la création d’ouvrages de confinement a été retenue.
Dans ce cas, la démarche générale d’insertion paysagère qui a été choisie, en accord avec les services de l’État compétents, est la recherche systématique d’une continuité paysagère, avec :
- un profil d’ouvrages le plus proche possible du profil naturel (relief notamment) ;
- pas d’enrochements massifs qui dénotent par leur taille importante et régulière sur le paysage minéral des Calanques (sauf dans la continuité d’enrochements existants) ;
- réduire au maximum l’impact paysager par le recouvrement avec de la grave non traitée (GNT) avec apport de granulométries variées pour obtenir un rendu le plus naturel possible ;
- dans les zones les plus anthropisées, utilisation de murs maçonnés en pierres naturelles ;
- la mise en place d’une paroi en béton projeté sculpté permettant d’assurer une bonne intégration paysagère des ouvrages, pour les dépôts présentant un risque d’instabilité à conforter, et situé dans un environnement naturel non anthropisé. L’usage de cette solution est toutefois limité au maximum.
Le programme de mise en sécurité
Ce programme a été conçu afin de limiter autant que possible l’impact des travaux sur l’environnement et les personnes résidant à proximité immédiate des dépôts.
Les emprises des zones de travaux ont été réduites autant que possible pour limiter l’impact du chantier sur les espèces animales et végétales.
Les ouvrages ont été conçus pour favoriser la recolonisation par les espèces endémiques (végétales et animales) du secteur.
Des dispositifs de protection seront mis en œuvre en phase chantier pour maîtriser les risques de pollutions accidentelles du milieu naturel et limiter les envols de poussières.
Une surveillance continue de la qualité de l’air sera réalisée pendant les travaux, afin :
- de s’assurer de l’absence d’impact sanitaire sur les populations ;
- d’identifier de manière réactive les travaux nécessitant la mise en œuvre de mesures de limitation des émissions de poussières.